vendredi 7 septembre 2007

Trois nuits

Sonia Ristic


Il y a des nuits qui sont cruellement courtes, et il y en a qui semblent éternelles.

Il y a eu une nuit, une nuit tellement épaisse que mille fois cette nuit durant j'ai pensé que plus jamais il ne ferait jour. J'attendais à la fenêtre, cigarette après cigarette. La nuit n'en finissait pas. Je guettais, j'épiais, je priais, mais rien, seule l’obscurité, le silence, la nuit à perte de vue, à perdre espoir. Lorsqu'il était là, je priais aussi, pour qu'une éclipse ait lieu et qu'elle soit sans fin, pour qu'un phénomène surnaturel vienne prolonger notre nuit, pour qu'un miracle repousse le jour, pour que le bonheur ne cesse pas. J’ai contemplé l’aube, incrédule, comme si ce fut un mirage. Ce n'est que lorsque le clair se fit et que j'entendis les premiers bruits de la vie, toute la musique du quotidien, que mon coeur se remit à battre et ma respiration redevint régulière.

« Alors, il n'y aura pas d'éclipse – ai-je pensé – la terre ne s'arrêtera pas de tourner, la vie suit son cours et moi, je suis toujours là... » Je me suis dirigée vers la salle de bains, les jambes engourdies et la tête lourde. Et sous la douche brûlante, une idée nouvelle est apparue, étrange. « C'est possible donc, la vie sans lui. Il y a un après, un après la nuit, un après nos trois nuits. »

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